Aujourd'hui, les espèces exotiques envahissantes (EEE) représentent la 2ème cause de perte de biodiversité dans le monde. Il est donc important de bien les connaître pour pouvoir les combattre.
Selon l'UICN (Union Mondiale pour la Nature), une espèce envahissante est une "espèce exotique dont l'introduction, l'installation et la propagation menacent les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes avec des conséquences environnementales et/ou économiques et/ou sanitaires négatives".
Le plus souvent, c'est l'homme qui est à l'origine de ses introductions, qu'elles soient volontaires (commerce, lutte biologique...) ou non (via les coques des bateaux...).
On estime qu'environ 1 espèce introduite sur 100 devient envahissante, c'est-à-dire qu'elle prolifère si bien dans son nouveau milieu qu'elle menace les espèces, les milieux naturels ou les écosystèmes locaux. Le plus souvent, les espèces qui deviennent invasives ont un fort taux de reproduction et elles ne retrouvent pas de concurrents, pas de maladie, ni de prédateurs assez efficaces dans leur nouvel environnement.
En Europe, les introductions d'espèces existent depuis plusieurs siècles, mais nous constatons avec l'augmentation des échanges mondiaux une accélération des arrivées ! Les espèces envahissantes ont donc progressivement colonisé le continent et la France n'est pas épargnée. Les milieux aquatiques et les zones humides étant particulièrement touchés par l'arrivée de ces espèces.
Croissance rapide, forte adaptabilité, grande capacité de reproduction, résistance extrême, etc. : parmi les espèces invasives présentes en Brenne actuellement, 2 sont clairement redoutables :
- l'écrevisse rouge de Louisiane,
- la jussie.
D’autres EEE devenues communes sont présentes sur le territoire du Parc, comme :
- le Ragondin
En provenance d'Amérique du Sud, il est élevé en France pour sa fourrure à partir de 1882. À l'arrêt de cette activité, ces animaux se sont disséminés dans la nature et se sont fortement multipliés. Aujourd'hui, ils causent d'importants dégâts, notamment au niveau des berges et chaussées d'étangs où ils creusent leurs terriers.
- La renouée du Japon
Introduite volontairement en France en 1939 comme plante ornementale, elle peut éliminer pratiquement toutes les autres espèces végétales grâce à un rythme de croissance élevé et à un feuillage abondant privant de lumière les autres plantes.
D’autres espèces exotiques envahissantes sont aux portes du Parc : Grenouille taureau, Xénope lisse… Restons vigilants !!!
Guide des espèces exotiques envahissantes du Parc : à télécharger ici
Zoom sur l'écrevisse rouge de Louisiane en Brenne
Pour découvrir cette espèce et le danger qu'elle représente pour la biodiversité de la Brenne, il faut absolument visionner ci-dessous "La peste rouge" de Fabien Mazzoco, un documentaire incontournable réalisé pour le Parc.
Originaire du sud-est des États-Unis, l'écrevisse rouge de Louisiane (Procambarus clarkii) est introduite en France en 1976 pour y être élevée. Échappés d'un de ces élevages, les premiers spécimens sont capturés en 1987 en Grande-Brière-Mottière (Loire-Atlantique).
Considérée aujourd'hui comme l'une des espèces envahissantes les plus préoccupantes, elle poursuit sa progression sur l'ensemble du pays : elle a été découverte en Brenne en juillet 2007.
Cette écrevisse est de couleur rouge, parfois de couleur bleutée ou violacée. D'une durée de vie de 3 à 5 ans, elle mesure 6 à 14 cm (sans les pinces) à l’état adulte et peut peser jusqu'à près de 100 grammes. Ses pinces puissantes sont granuleuses et couvertes de taches rouges.Sur l'article précédant les pinces, l'Écrevisse rouge de Louisiane possède un ou deux ergots caractéristiques.
L'habitat naturel de l'Écrevisse rouge de Louisiane est le marécage, mais elle s'adapte parfaitement dans tous les milieux aquatiques, même pauvres en oxygène (étangs, lacs, marais, rivières, ruisseaux...) et respire sans problème hors de l'eau.
L'élimination de cette espèce est pratiquement impossible !
- Elle se reproduit de manière très efficace : dès l'âge de 6 mois et deux fois par an. Elle peut porter jusqu'à 600 œufs sous son abdomen par ponte !.
- Elle est capable de résister à des conditions extrêmes (gel, fortes températures…)
- Elle supporte des doses très importantes de polluants, mais est aussi porteuse saine de la peste des écrevisses dont elle favorise la transmission aux populations locales.
- De même, elle est tout-à-fait capable de résister à de grandes sécheresses car elle creuse des terriers dans les berges.
- Plus surprenant encore : son pouvoir colonisateur ! L'écrevisse de Louisiane est capable de survivre plusieurs jours hors de l'eau et parcourir jusqu'à 4 kms en une seule journée !
Aujourd'hui, elle poursuit sa progression sur l'ensemble du pays et ravage tout sur son passage. On dit que son mode de prédation est sélectif et successif, ce qui veut dire qu'elle épuise les ressources alimentaires les unes après les autres : elle mange de préférence les herbiers aquatiques, puis lorsqu'ils ont totalement disparu du milieu, elle s'attaque à une autre proie (mollusques, têtards de grenouilles, œufs et jeunes poissons, insectes, larves diverses...), et ainsi de suite.
Elle cause ainsi de profonds déséquilibres dans l'écosystème où elle apparaît : la végétation aquatique est une source alimentaire et un refuge pour de nombreuses espèces (poissons, canards, insectes, amphibiens...) et sa disparition les rend vulnérables et pénalise un peu plus l'activité piscicole.
De plus, les terriers que l'Écrevisse rouge de Louisiane creuse dégradent la qualité de l'eau en la rendant trouble. Les berges sont fragilisées et finissent par s'affaisser...
À titre d'exemple, elle a colonisé en moins de 10 ans les 200 km² de zones humides du Bassin Brivet (Loire-Atlantique) et fait disparaître du site :
- 99% de la végétation aquatique
- 71% des genres de macro-invertébrés (insectes, mollusques, ...)
- 83% des espèces d'amphibiens
- 52% du gibier d'eau (disparition de 75% des espèces de canards...)
Le Parc de la Brenne lutte au quotidien contre cette espèce avec une brigade de 3 personnes.
Des nasses sont prêtées pour que les propriétaires d'étangs piègent eux-mêmes s'ils en ont la possibilité et la volonté.
En savoir plus sur l'action, allez faire un tour par là !
Que faire si vous en voyez ? C'est par ici.
La jussie
Originaires d'Amérique du Sud, la Jussie péploïde (Ludwigia peploides) et la jussie à grandes fleurs (Ludwigia grandiflora) ont été importées en France en tant que plantes ornementales au début du XIXème siècle.
Aujourd'hui loin des bassins d'agrément, on les retrouve dans de nombreux lacs et cours d'eau. Depuis 1989 en Brenne, la jussie a déjà colonisé plus de soixante-dix plans d’eau.
Les jussies possèdent des feuilles luisantes de couleur vert foncé et des tiges rouges plutôt velues. Leurs fleurs à 5 pétales apparaissent d'un jaune vif sur les étangs dès le mois de juin.
Ces plantes aquatiques se développent dans des milieux stagnants (étangs, mares,...) ou à faible courant. Leur fort pouvoir d'adaptation permet de les rencontrer également dans d'autres zones humides telles que les prairies humides ou les fossés. Elles produisent des graines en automne qui germent au printemps, mais leur propagation se fait principalement par bouturage : 1 cm de tige ou de racine seulement peut leur permettre de se régénérer !
La jussie est ainsi capable de coloniser de manière efficace toutes les surfaces en eau disponibles. Un tapis végétal recouvre rapidement l'étang et étouffe les autres plantes. La pêche à la ligne, les déplacements en barque et même la chasse au gibier d'eau deviennent des activités très difficiles, voire impossibles, sur un plan d'eau couvert de jussies.
Aussi, dans un étang à vocation piscicole, la jussie fait rapidement chuter son rendement : moins de lumière, moins d'oxygène, moins de nourriture. Les poissons ne survivent pas...
Comment lutter contre la jussie ?
En Brenne, les étangs sont organisés en chaîne et la colonisation de la jussie d'étang à étang est facilitée lors des vidanges, notamment par sa capacité de bouturage à partir de tous les fragments de tige. De plus, la lutte contre la jussie s'avère très difficile au regard de la grande résistance qu'elle possède.
La lutte par produits chimiques est fortement déconseillée par l'Agence de l'eau Loire-Bretagne, puisqu'elle détruit aussi les espèces "bénéfiques" pour l'étang. Le fauchage est aussi à proscrire : il fragmente les plantes et favorise leur dispersion.
L'arrachage, manuel ou mécanique, reste le moyen le plus efficace pour limiter la progression de la jussie. Cependant, il doit être effectué régulièrement et ne suffit pas à supprimer toute trace de cette plante. Le combat à mener doit s'organiser sur plusieurs années.
Le Parc de la Brenne lutte au quotidien contre cette espèce avec une brigade de 3 personnes.
Des chantiers d'arrache manuel ou mécanique sont organisés sur des étangs concernés par ce problème.
En savoir plus sur l'action, allez faire un tour par là !
Que faire si vous en voyez ? C'est par ici.